Sur tous les navires qu’ils soient marchands ou militaires, perdure une tradition vieille de plusieurs siècles car datant de la marine à voile, c’est la cérémonie du « passage de la ligne ».
Par la ligne, on désigne cette frontière virtuelle qu’est l’Equateur, latitude zéro, limite entre hémisphères nord et sud…
Les marins ont toujours été superstitieux, forcément, puisqu’ils sont livrés à la merci des éléments dans cette immensité parfois hostile que forment les océans, isolés dans leur embarcation qui reste bien fragile par rapport à la force d’une mer déchainée. Alors, ils espèrent la faveur des Dieux, ou tout au moins éviter leur colère ! C’est là que se trouve l’origine de la cérémonie du passage, entre superstition et rite païen, une offrande à Neptune Roi des mers pour obtenir l’autorisation de croiser l’Equateur, et de naviguer d’un hémisphère à l’autre avec bon vent et belle mer…
Ainsi, dans la pratique, tout marin embarqué doit avoir été « baptisé » selon le rite du passage, et fournir pour preuve au Capitaine le « certificat de passage » qu’il aura obtenu lors d’un précédent embarquement. En fait, ce certificat est comme un trophée que tout jeune marin souhaite acquérir en souvenir de son premier passage par l’équateur, souvenir qu’il gardera ensuite durant toute sa carrière. Ainsi, si la cérémonie a des petits airs de « bizutage », les jeunes sont les premiers demandeurs et tout se fait dans la bonne humeur générale !
Pour faire la cérémonie, il faut des personnages… Et donc des costumes, les principaux : Neptune Roi des mers et Amphitrite sa belle épouse.
Et comme il y a rarement de femme à bord, Amphitrite est souvent un peu spéciale…
Evidemment le couple Royal est en vedette puisque c’est à lui que l’autorisation de passer l’équateur sera demandée. Mais aussi, plusieurs autres acteurs pour un mélange plutôt hétéroclite : un astrologue (par rapport aux étoiles qui guident le navire), un religieux (une touche de chrétienté dans un rite païen, signe caractéristique du mélange habituel entre foi et croyances païennes, « on prend tout ce qu’on peut face aux dangers des mers »), un thérapeute (pour s’assurer de l’aptitude des novices) et un diablotin qui rode… Et enfin des gardes qui sont en charge de maintenir l’ordre chez les novices, et d’assurer l’application des épreuves de passage. Cette configuration peut varier légèrement, mais dans les grands traits, elle n’a pas changé depuis des siècles !
Maintenant, concernant les épreuves de passage… Cela varie d’un navire à l’autre, mais quelques étapes clés, le but étant de toujours rester dans une ambiance « bon enfant » car c’est une fête avant tout:
Le contrôle médical d’aptitude:
Le rasage hygiénique:
Quelques gages, sous forme de jeux, comme le passage du tonneau…
Les novices sont alors prêts pour la cérémonie finale, les épreuves passées ayant normalement convaincu Neptune de leur engagement, ils vont alors tirer le Char Royal (photo d’entête) jusqu’au lieu du baptême.
Fiers (ou soulagés…) d’en être arrivé là !
Arrivés au bord de l’eau nécessaire au baptême, généralement la piscine du navire, une dernière épreuve… le clou de la cérémonie, immanquable quelque soit le navire ou l’époque : embrasser les pieds emmoutardés de Neptune et Amphitrite pour prouver leur allégeance ! Et enfin, à l’eau pour conclure !!!
Des novices maintenant devenus marins, heureux non ?
Et quand je disais que cette cérémonie ne date pas d’hier, voilà une gravure du 18ème siècle (http://community.blogs.wesleyan.edu/2013/08/14/pick-of-the-week-july-26-account-of-a-voyage-in-1805/) illustrant cette même fête… reconnaissez-vous les personnages ?
Salut Axel,
Je découvre ton site, le passage de la ligne me rappelle de nombreux souvenirs. Mais je crois que dans la « Royale » il a été abandonné malheureusement. J’ai passé aussi le cercle polaire et là, il fait beaucoup moins chaud!
Amicalement
Bruno
Merci Bruno pour ton passage !
Ah oui? Il me semblait que la Marine française perpétuait aussi la tradition… Dommage